Après le galop d’essai de Laurent Wauquiez qui avait suscité un tollé jusque dans les rangs de la droite, le parti sarkozyste relance l’idée selon laquelle les bénéficiaires du RSA sont des fainéants et des fraudeurs. Une campagne médiatico-politique est orchestrée sur fond de présidentielle.
«Laurent Wauquiez a posé les vraies questions mais pas les bonnes réponses », estime Marc-Philippe Daubresse, secrétaire général adjoint de l’UMP, rapporteur à la convention de son parti qui se tient aujourd’hui sur le thème de la « justice fiscale ». Mais avec les bénéficiaires du RSA dans le collimateur.
Le Figaro enfonce le clou
Le 12 mai, le ministre des Affaires européennes avait dit : « L’assistanat est le cancer de notre société. » Pavé dans la mare rapidement détourné. Pourtant, l’objectif de ce séminaire du parti sarkozyste est de faire du « buzz » politique, social et idéologique à partir des ondes laissées par les déclarations préparatoires de Wauquiez. Il s’agirait d’assortir le droit au RSA d’obligations de travail précaire. Mais surtout, l’opération politico-médiatique consiste à creuser le sillon d’une France prétendue malade de l’assistanat, en prélude à la campagne présidentielle. Elle illustre aussi une technique de communication politique.
Le Figaro magazine daté du 4 juin titre sa une par « une enquête sur la France des assistés ». L’on voit un jeune homme barbu dormir au creux du drapeau national drapé en hamac. « Et si cette volonté d’imposer des obligations nouvelles aux citoyens n’était qu’un moyen de masquer des obligations non tenues ? » demande Martin Hirsh, le père du revenu de solidarité active (RSA). Son équation de départ était que « les revenus du travail doivent toujours être plus élevés que ceux de la solidarité nécessaire ». Martin Hirsch,
devant l’UMP, aura six minutes pour défendre le principe adopté par les parlementaires il y a deux ans jour pour jour, avec le soutien de Nicolas Sarkozy et la bienveillance de la gauche. Laquelle avait voulu y voir une bien timide approche d’une posture antipauvreté.
Deux ans après, Jean-François Copé, patron de l’UMP a lancé hier matin le deuxième étage d’une fusée qui avait décollé dans une provocation savamment ordonnée. Pour lui, c’est que du bonheur. Dans un entretien à la Croix, il enfonce le clou : « Il y a besoin d’un correctif au dispositif du RSA. » Et de proposer aux bénéficiaires du RSA socle (ex-RMI), dans le cadre d’un contrat unique d’insertion de travailler entre cinq et dix heures par semaine dans le domaine de l’aide aux personnes dépendantes des
services publics locaux. En cas de refus, le RSA serait progressivement diminué.
La division pour stratégie
Laurent Wauquiez avait, à la mi-mai, mis le feu aux poudres. Déclarant « dire tout haut ce que beaucoup de Français pensent tout bas ». Reprenant à sa manière l’un des thèmes du candidat Sarkozy en 2007, Laurent Wauquiez appuyait sa démonstration sur un axiome : « L’insuffisante valorisation du travail », sur le mode du « travailler plus pour gagner plus. » Son idée : rendre obligatoires, sous peine de sanction, cinq heures de travail hebdomadaires aux bénéficiaires du RSA. Tollé à gauche. Marie-George Buffet (PCF) : « Les personnes qui touchent le RSA ne demandent pas cinq heures de travail social, elles veulent travailler et gagner le SMIC. » Elle avait alors dénoncé une nouvelle manœuvre pour draguer l’extrême droite. Le PS invitait à « regarder en face le bilan catastrophique de Nicolas Sarkozy en matière d’emploi au lieu de stigmatiser ceux qui souffrent de ses échecs ». Distanciation à droite. Roselyne Bachelot, ministre de la Solidarité, avait évoqué « des difficultés de principe » dans les propositions de Laurent Wauquiez. Les parlementaires UMP étaient divisés. Le premier ministre et Nicolas Sarkozy avaient sifflé la fin de la récréation. Tout était fini ?
Tout commençait. Car la bactérie était dans l’organisme social et politique. Si l’idée d’une loi avancée par Laurent Wauquiez semble abandonnée, le thème est assurément l’un de ceux de la campagne électorale. Il n’y a pour la droite que des avantages : division des Français, extrême droite caressée dans le sens du poil, appel du coude aux classes moyennes inquiètes de voir la pauvreté gagner du terrain parmi elles, abandon électoral des couches populaires les plus pauvres. Sans oublier les nouvelles responsabilités politiques sur l’emploi confiées aux collectivités locales (majoritairement à gauche) qui se verraient contraintes à de nouvelles obligations bien que financièrement déjà rendues exsangues.
PCF : « l’UMP, du RSA au STO… »
« Sanctionner les plus pauvres parce qu’ils sont les plus fragiles est particulièrement cruel, injuste », commente le PCF. Dans un communiqué, il constate « qu’en somme, du RSA au STO (Service du travail obligatoire, réquisition des travailleurs français par l’occupant allemand durant la Seconde Guerre mondiale – NDLR), on n’arrête pas le progrès » à l’UMP. Pour le PCF, s’il y a « 8 millions de travailleurs pauvres », c’est « à cause de la politique du gouvernement aux ordres des marchés financiers et du Medef ».
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