POLITIQUE - «Il est ministre de quoi déjà ? L’agriculture ?» Hier à Lille, près de la gare
Lille-Europe, Dominique de Villepin passe, mèche blanche et sourire bronzé. Des
passantes, Sofia, vendeuse, et Chainèze, esthéticienne, lui serrent la main. «Il est bel
homme, dit Chainèze, il m’a fait un clin d’œil.» Mais elle ne voit pas qui c’est, et encore
moins quel est son parti. «Socialiste ?» On explique : ex-UMP, ancien Premier ministre,
adversaire de Sarkozy. Ça lui va. Elle lève le poing : «A bas Sarkozy.»
«Star». Sous le soleil, l’ancien Premier ministre marche à grands pas, les caméras dans
son sillage, longe la statue de Mitterrand sans la voir. Une demi-heure à pied, dans les rues
du Vieux-Lille, vers la maison natale du général de Gaulle. La troupe déborde sur la rue,
ralentit les voitures. Lui, il embrasse, salue. Une femme le regarde de loin : «J’aurais
préféré une vraie star.»
En terrasse, James-Djamel, 35 ans, commerçant, «sans-emploi après une faillite», a toujours voté «socialiste» mais a «chaud au cœur» de serrer la main du patron de République solidaire.
«Il amène de nouvelles idées». Exemple,
«pour les gens sans
ressources, 850 euros par mois, c’est bien».
Un autre James, 26 ans, technicien en climatisation couvert de poussière, prend le frais. Villepin ? Bien sûr, il voit très bien : «J’ai manifesté contre le CPE quand j’étais au lycée.» Devant un des derniers troquets ouvriers du quartier, un retraité s’enthousiasme : «Je l’aime bien, comme de Gaulle, comme Chirac. Villepin, il est à 100% gaulliste.» Et Sarkozy ? «Faut pas me parler de Sarkozy.
Il a fait une politique américaine. Il a fait entrer la France dans le pacte atlantique.» Voter Villepin ? «Non, je suis pas un bourgeois, je vote à gauche.» Il ajoute : «Mais si je retourne ma veste, je voterai pour lui.» Villepin s’engouffre dans la maison natale du Général. Portraits des ancêtres, nappes en dentelle, statuettes de la Vierge, plancher ciré. A un journaliste qui lui demande si ce n’est pas le lieu idéal pour une candidature, il sourit puis :
«Vous avez un certain sens de la profanation !» Quelques minutes plus tôt, il a déclaré que de Gaulle renforçait sa conviction «sur l’importance d’être une nation, d’être un peuple». Brioche. Direction Marcq-en-Barœul à la boulangerie industrielle Château Blanc, filiale du groupe Holder, qui détient aussi les boulangeries Paul. Villepin monte dans le bus avec militants et journalistes. Chez Holder, blouses blanches, ambiance laboratoire et parfum de brioche.
Villepin en profite pour demander au grand patron, Francis Holder, une des fortunes industrielles du Nord, ce qu’il pense du projet de prime à 1 000 euros. «C’est pour les entreprises qui paient des dividendes», répond Holder. «Alors vous allez vous arranger pour ne pas payer de dividendes ?» C’est Hervé Vallat, le patron de Château Blanc, qui répond :
«Ça ne doit pas être encadré par une loi.»
Ça tombe bien, Villepin pense pareil. Holder demande à l'ancien Premier ministre comment on peut payer quelqu’un 850 euros «à ne rien faire. C’est invraisemblable. Les gens vont se dire "à ce tarif-là, je ne travaille plus"». Réponse : «Il y aura une contrepartie, un engagement d’activité d’intérêt général.L’accueil des personnes dépendantes, l’aide aux enfants en difficulté scolaire, un pécule de départ pour ceux qui créent une entreprise solidaire.»
A Marcq-en-Barœul, Dominique de Villepin ne s’est pas arrêté à la mairie. Selon son staff, le maire UMP, Bernard Gérard, n’a pas voulu. Pourtant, glisse la secrétaire générale de République solidaire, Brigitte Girardin, «on a reçu un accueil républicain chez François Rebsamen à Dijon, chez Patrick Roy à Denain», maires socialistes, «et dans une autre mairie UMP».
Pas à Lille hier, mais Aubry lui a envoyé des chocolats.
Haydée Sabéran
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