Au lendemain de la présentation du projet vraiment novateur de Dominique de Villepin, je me pose sincèrement la question : le pays souffre-t-il assez pour accepter de relever ce merveilleux défi que lui propose le Président de République Solidaire ?
Les éléments de la donne sont connus et reconnus :
1. Une République citoyenne
2. Un secteur financier responsabilisé
3. Un secteur industriel musclé, avec des résultats à l'exportation et créateur d'emplois sur notre territoire
4. Un Etat modernisé, régulateur, coordinateur et vigoureux dans ses actions
Mais ces points saillants du renouveau sont-ils de taille à combattre cette morosité qui nous entrave, cette indolence citoyenne qui nous fait accepter les petits escrocs intellectuels ou privilégier les demi-mesures ou les cautères sur une jambe de bois, ces analyses savamment distillées par les spécialistes auto-proclamés de la "science politique" ?
S'ingéniant à réduire la trajectoire de l'ancien Premier ministre dans la réductrice perspective centriste les médias s'échinent une fois de plus à nous refaire le coup de l'"il n'y a pas d'autre alternative", que le sempiternel débat droite / gauche, personnifié jusqu'à la nausée par l'affrontement UMP / PS, est la voie unique (celle bien entendu qui nous mène dans l'impasse, mais ils se gardent bien de nous préciser). Tout juste nous agitent-ils sporadiquement, ces belles dames et beaux messieurs de l'information "politique", le spectre d'une Marine Le Pen ceinte du grand cordon de Grand maître de la Légion d'honneur (ultime dignité réservée au chef de l'Etat), pour mieux sans doute nous voir nous réfugier dans le giron d'une dualité obligée !
Faudra-t-il que le pays s'embourbe définitivement dans la crise de régime, dans la crise économique définitivement irrésolue, dans la crise politique définitivement installée dans les rangs de la classe dirigeante, dans la crise sociale jetant définitivement aux oubliettes ces valeurs héritées de notre histoire ?
Devrons-nous avaler l'amère potion d'un second quinquennat irrespectueux, marqué par l'incompétence, l'oligarchie d'une classe arrogante et puisant impunément dans la richesse créée par tous ?
Devrons-nous basculer dans le jeu du pendule, errant d'une droite ultralibérale / sociale à une gauche sociale / ultralibérale avec l'infime différence existante entre bonnet/blanc et blanc/bonnet ?
Aurons-nous le lucide courage, enfin, d'envoyer ad patres toutes ces plantes saprophytes qui nous enfument le jugement, les journaleux, les médiocres représentants du système, les "spécialistes" de l'économie et autres grands prêtres animateurs d'une liturgie chaque jour d'avantage orientée vers la perte de substance de notre République ?
Faudra-t-il donc que nous soyons à chaque fois non pas au bord du gouffre mais carrément dedans, comme en juin 40 ou en mai 58, pour que le sursaut se produise ?
Ces imbéciles prétentieux de la classe dirigeante et manipulatrice, la faiseuse d'opinion chère à Walter Lippmann ou les consentements fabriqués dénoncés par un Noam Chomsky, tous secteurs confondus, me font penser à la lucidité d'un Louis XVI inscrivant dans son journal à la date du 14 juillet 1789 "Rien à signaler". Le bateau coule mais ne changeons rien aux petits travers ni à nos petites certitudes et à nos rentes de notoriété ! Nous coulerons parce que nous sommes les plus forts ! La route de l'espoir est coupée ! J'entends d'ici la voix suave de notre grande argentière, la dame Lagarde, susurrer "Le peuple a faim ? Il n'a plus de pain ? Mais qu'il mange de la brioche !".
Stupide aveuglement, arrogance mortifère, bêtise de la pensée unique ! On nous assène avec certitude que l'ascenseur social est en panne en omettant de préciser qu'un tel outil est fait sans doute pour monter mais aussi pour descendre ! Non l'ascenseur social n'est pas en panne, il fonctionne même diablement bien mais on s'obstine avec la même constance à droite comme à gauche à appuyer sur le bouton du sous-sol !
Aux armes citoyennes et citoyens ! Portons le projet de Dominique de Villepin avec l'engagement désintéressé du sans-culotte, l'opiniâtreté des grenadiers de la Garde impériale, l'esprit de résilience des membres obscurs de l'armée des ombres entre 1940 et 1944 ! Notre foi dans la justesse de notre combat est notre meilleure arme !
Ils ne nous voleront pas notre espoir, ce nécessaire sursaut digne de la grandeur de notre France, digne de l'avenir de chacun d'entre nous.
Lionel Sontag
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